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L'univers des sensations

February 2018
年礼の水仙の香に迎えられ

Visites du Nouvel an –
le parfum des narcisses
pour m’accueillir

Akiko Noguchi

Cette impression agréable du yuki dont parlait Noguchi (voir Newsletter n°1) se dégage de l’infinie mouvance des sensations, de leur interaction entre elles et avec celui qui les observe. Si quelque chose se transmet, ce sont les informations qu’elles communiquent. La grande histoire des sensations, c’est de se manifester involontairement et, selon la nécessité, d’alerter en désignant les besoins de l’organisme.

Nous avons l’habitude des sensations externes, celles qui viennent de l’extérieur : la main se tient spontanément à bonne distance du poêle pour se réchauffer sans se brûler.

Les sensations internes, celles qui viennent de l’intérieur, devraient être encore plus lisibles dans leurs besoins, et pourtant, nous avons du mal à leur faire confiance. Mettre du chaud sur mon poignet foulé ? Du froid ? Quand ? Comment ? Alors, que dire de l’accompagnement des sensations lorsqu’il s’agit d’autrui ?

Plonger dans l'univers des sensations internes, apprendre à les discerner sans les juger, poser son regard sur elles sans les contraindre, les prendre en main en se laissant sculpter à leur contact, tout cela est au fond jubilatoire. La vie se déroule en direct dans le paysage de la santé.

La main du praticien yukidō se laisse guider par les chaud/froid, tendu/détendu, mouvements/immobilité qui expriment leurs besoins d’effleurement, de contact ou d’appui. Infime ou vaste, pesant ou aérien, fulgurant ou suspendu, le geste de la main est réévalué à chaque instant pour être adéquat. On comprend dans cette approche du soin le côté insaisissable et mouvant du ki. Ce qui pourrait à première vue traduire une absence de technique est en réalité un geste d’une extrême précision : au lieu de suivre une carte imaginaire allant de points en points, d’organes en organes, la main est guidée par la mouvance des flux qui l’appellent et la modèlent. L’intelligence du corps accompagné prend les rennes, celle du soignant ne peut qu’applaudir à la pertinence des propositions, garante de l’efficacité du soin. 

Nos maîtres

Les adultes bien portants sont souvent d’une docilité exemplaire : si le soin ne leur convient pas, ils ne pipent mot. Mais les enfants, les personnes âgées, les personnes souffrant d’un handicap ne se laissent pas faire ainsi : leur sensibilité ne le leur permet pas. Ils sont nos maîtres, à nous les soignants à mains nues.

Apprendre à aiguiser sa propre perception à ce qui est adéquat et favorable est indispensable à l’accompagné comme à l’accompagnant.